Jeudi 7 avril : exposition « Communes » du photographe Raymond Depardon
Une quinzaine de membres des Amis du musée Paul-Valéry se sont retrouvés jeudi 7 avril au Pavillon populaire de Montpellier pour une visite guidée de l’exposition « Communes » du photographe Raymond Depardon.

Notre groupe (auquel se sont accrochées quelques « touristes » curieuses) a suivi la médiatrice Laeticia Cornée, adepte de la présentation interactive, dans le bâtiment divisé en zones de couleurs, l’orange et la jaune, destinées à éclairer le visiteur sur ce qu’il va être amené à voir.

Dans la zone orange donc, on doit comprendre comment et pourquoi un ancien photographe de guerre qui célèbrera bientôt son quatre-vingtième anniversaire s’est embarqué, au lendemain du confinement, dans une camionnette brinquebalante pour aller fixer avec un appareil antédiluvien (une chambre photographique) sur des plaques argentiques de paisibles villages languedociens dont le point commun ici est sans doute d’avoir dans leur sous-sol suffisamment de gaz de schiste pour avoir éveillé naguère l’intérêt de pétroliers texans.
Des cartes IGN et Michelin stabilotées, une photo documentaire de la DATAR montrant un troupeau de charolais, des épreuves anciennes de photos de vacances dans la région, une chambre photographique à côté d’un reflex… Il est clair que Raymond Depardon n’est pas de la génération pixels, il a grandi à la campagne et ne se sert pas du GPS pour trouver son chemin. Cet homme auquel il ne reste vraisemblablement pas beaucoup de temps tient néanmoins à le prendre. Est-ce un éloge de la lenteur ?
Avant de poursuivre, il faudra mettre des mots sur une image, un enfant qui s’approche du jet sans nul doute rafraichissant d’une fontaine en marchant sur les barres de fer destinées jadis aux cruches, il est soutenu par sa mère enceinte, la journée doit être torride, le Soleil chauffant à blanc le ciel et effaçant les ombres des murs de pierres.
Les images parlent et en insistant elles disent ce qu’on veut. Que veut-on ?

On arrive dans la zone jaune. On a été prévenu : il ne faut pas s’attendre à une quelconque esthétique dans le documentaire. En effet! Le parti pris n’a pas été de faire de belles photos (lumières obliques, cadrages aléatoires, tirages charbonneux) mais celui de faire un état des lieux, presque un constat d’huissier. Et bien les communes qu’a visitées Raymond Depardon, sans âmes qui vivent, semblent être du domaine de l’archéologie, citées perdues d’un monde promis aux catastrophes écologiques.
Avec l’estampille Depardon, le témoignage d’une singulière misanthropie a sans doute valeur d’archives du futur antérieur (quoiqu’avec les moyens actuels, numérique et drone, il aurait sans douté été plus pertinent). Il passe néanmoins à côté de la question qui a motivée son reportage: s’est-on battu contre l’extraction du gaz de schiste juste pour mourir ainsi lentement ou plutôt misérablement ?
Disons que cela est déconcertant. C’est sans doute la raison pour laquelle plusieurs participants à la visite se sont éclipsés avant sa conclusion au grand désarroi de notre médiatrice qui aurait tant aimé nous « ouvrir les yeux ».
Photos du dossier de presse





De gauche à droite et de haut en bas:
Causse-Bégon; Aulas; Mireval; Hameau de Saint-Martin-d’Orb, Le Bousquet d’Orb; Hameau de la Muse, Mostuéjouls © 2021 Raymond Depardon / Magnum Photos