Quasiment un quart des Amis du musée Paul-Valéry se sont retrouvés jeudi 17 novembre sur le parking du château de Castries. Pour faire face à l’affluence, l’association des Amis du château qui a en charge les visites a mis à notre disposition deux guides, Mme Mercadier se consacrant au bâtiment et M. Fournier aux jardins et l’aqueduc. Avec eux, nous avons découvert l’histoire de la famille de Lacroix de Castries imbriquée pendant près de cinq siècles avec celle du château qui domine le village éponyme et les plaines alentours.
Un point de situation d’abord. « Le petit Versailles du Languedoc » est désormais propriété de la commune qui la racheté en 2013 à l’Académie française à laquelle il avait été légué en 1985 par un de ses membres, le duc René de La Croix de Castries, dont l’épouse Monique de Cassagne, en garda la jouissance jusqu’à sa mort en 2009. Hélas ! cette dernière laissa le domaine en déshérence après le décès de son époux en 1986. Tant et si bien que le château et le parc sont en très mauvais état quand les Castriotes les récupèrent. Il faudra toute l’ardeur des bénévoles et des millions de travaux pour leur rendre un peu de leurs lustres d’antan.
Un point de prononciation ensuite : le village se prononce comme cela s’écrit, « castrie(s) », en revanche quand on parle de la famille, il convient de dire « kastr ». L’origine de la famille de La Croix remonte en effet au Moyen-Âge, en des temps où l’accent tonal du languedocien était sur la première syllabe et non sur la dernière comme en français. Donc les de La Croix sont de Kastr tandis que leur château est à Castries qu’il n’est ainsi pas possible de confondre avec Castres dans le Tarn.
Un point de détails enfin : le buste sous le porche de la cour d’honneur n’est pas celui de Louis XIV, comme l’a cru le duc René en l’achetant en 1937 à un antiquaire de Toulouse et comme on pourrait le croire en le voyant. C’est celui de Ferdinand III de Médicis réalisé par le sculpteur italien Giovacchino Fortini vers 1700. La vérité a éclaté lorsqu’il fut découvert qu’un écusson et un cartouche identiques à ceux du buste de Castries figurent sur un buste, également identique à celui de Castries, conservé au musée Lever de Liverpool.
Nous pouvons entrer dans le vif du sujet, le château construit à partir du XVIe siècle sur les vestiges d’un château médiéval et modifié jusqu’au XIXe siècle sans avoir jamais été réellement achevé (le bâtiment qui devait faire un U n’est qu’un L, un mur faisant office d’aile est).
Après un bref passage par les cuisines où les casseroles en cuivre ont été astiquées par les bénévoles de l’association, nous voilà au premier étage de l’aile ouest dans la grande salle des États du Languedoc, la pièce maîtresse du château.
Le riche mobilier qui s’y trouvait avant le début des travaux de restauration (en témoigne la photo ci-dessus) n’a pas encore été remis en place. Aux murs de couleur rouge-oranger, sont accrochés des reproductions des portrait en pieds des plus illustres membres de la famille tels Charles Eugène Gabriel de La Croix, quatrième marquis de Castries, maréchal de France, ministre de la marine de Louis XVI et vainqueur de la bataille de Kloster Kampen, ou encore le cardinal de Fleury et Patrice de Mac Mahon, duc de Magenta, président de la République, qui avait épousé Élisabeth de La Croix de Castries, dernière de la branche aînée des Castries.
Avant de passer dans l’aile nord, on remarque sur le mur ouest, un bas-relief représentant la mort du chevalier d’Assas, par le sculpteur d’Antoine, daté de 1776, qui est le modello en terre cuite de la réalisation en marbre figurant sur la fontaine de la Licorne de la place de la Canourgue à Montpellier. Et au fond de la salle, un immense poêle en faïence qui a été installé par une duchesse d’origine autrichienne au XVIIIe siècle.
L’aile nord est une enfilade de salons et de chambres où sont exposés une partie de l’importante collection de mobiliers et d’objets, correspondant à l’ameublement de l’édifice voulu par le duc de Castries au cours du XXe siècle. A l’extrémité est se trouve la chambre de la reine, ainsi nommé après le séjour d’une reine du Portugal. Il y a, pour les mêmes raisons, à l’étage supérieur, une chambre Mac Mahon qui n’est pas encore ouverte au public.
On descend dans le parc pour remonter le temps. On retrouve en effet ici René Gaspard de La Croix (1611-1677), époux de la comtesse Isabelle de Bonzi, qui en recevant la baronnie de Castries de Louis XIV devient René Gaspard de La Croix de Castries, lieutenant général des armées du roi et gouverneur du Languedoc.
Il lui faut un petit Versailles pour « épater la galerie » donc, outre sa salle des États, un jardin à la française façon Le Notre. Faire des plans n’est pas un problème pour le jardinier du roi mais ses parterres géométriques sont agrémentés de bassins et de fontaines. Or l’eau qui fait cruellement défaut dans le village. Heureusement il y a une source non loin, Fontgrand, à Saint-Mathieu-de-Tréviers. Pierre-Paul Riquet qui vient d’achever la construction du canal du Midi avec le soutien des États du Languedoc fait les plans de l’aqueduc long de près de 7 km avec une dénivellation de 3 m et des arches pouvant culminer à 20 m.
L’ouvrage est achevé en 1676. Il irriguera le parc (dont l’orangeraie) et le village pendant au moins deux siècles puis, faute d’entretien, sera laissé à l’abandon. Jusqu’à ce qu’en 2003, des bénévoles, attachés au patrimoine local, entreprennent le débroussaillage et l’entretien de l’aqueduc afin de le remettre en valeur.
Plus de détails, plus d’information sur le site internet des Amis du château qui nous ont permis de faire cette passionnante plongée dans l’histoire d’un grand monument languedocien.
AMIS DU MUSÉE PAUL-VALÉRY 
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